CIRTEM a 30 ans : Interview de Christian Saubion

Cette année, CIRTEM a 30 ans. L’occasion pour son fondateur, Christian Saubion, de dresser un bilan de cette époque charnière pour les technologies de l’électronique de puissance.

 

Quelle a été la motivation pour créer Cirtem ?

A la création de Cirtem, j’avais 33 ans et seulement quelques années d’expérience. Ma motivation était de mener mon métier d’ingénieur selon ma vision en toute indépendance. Je l’avais pratiqué dans quelques entreprises, mais il y avait effectivement ce goût d’indépendance. A côté de ça, le côté entrepreneur, la volonté de créer de l’emploi mais au départ c’était bien de faire mon métier d’ingénieur comme j’en ai envie et me faire plaisir en faisant ce métier.

Vous avez été aux avant-postes de l’innovation technologique en électronique de puissance durant 30 ans. Quelles évolutions du domaine ont été les plus marquantes selon vous ?

C’est une période qui a été très importante pour l’évolution de notre métier l’électronique de puissance. On peut dire qu’au départ c’était assez confidentiel ou peu connu et dont les applications, en particulier les applications hautes performances, étaient contenues dans des marchés de niche assez étroits. Et depuis en ces 30 ans, l’évolution des connaissances et des composants ainsi que la demande forte d’efficacité énergétique ont fait qu’elle a percé des marchés nouveaux de grande série telle que l’automobile électrique, l’aéronautique avec l’avion plus électrique, mais aussi sur des applications stationnaires telles que le smart grid. Ces éléments ont permis le développement de la technologie et faire que cette discipline devienne de plus en plus reconnue.

En 30 ans, nous sommes passés d’un contexte national avec des grandes entreprises monopolistiques à un contexte Européen avec des marchés libéralisés. Quel regard avez-vous sur l’évolution du contexte commercial et des politiques publiques de soutien à l’innovation ?

Alors c’est un peu contradictoire peut être…
D’un côté il y a une évolution très forte de la politique de soutien à l’innovation et des montants très significatifs qui ont été alloué à travers les plans régionaux, nationaux, et européens, pour faire monter le niveau de R&D national, c’était un objectif affiché. La structuration des capitaux-risqueurs aussi. Le nombre d’intervenants a évolué de façon très significative. C’est quelque chose dont les PME innovantes ont bénéficié.
D’un autre côté, il y a aussi cette perte de rapport étroit avec les grands donneurs d’ordre qui finançaient la R&D. On a perdu un peu de ce rapport étroit avec ses sociétés là.
Globalement, il y a eu une augmentation forte du nombre de travaux sur le même sujet. Il y a un enrichissement global des acteurs qui sont venus d’horizons différents, la marmite s‘est mise à bouillonner de façon plus forte, le volume a permis de former beaucoup de jeunes, on y a gagné sur le volume d’innovation même si on a peut-être perdu un peu d’efficacité localement mais pour un bien collectif.

Revenons à Cirtem. Quelles ont été les projets et les évènements les plus marquants pour vous ?

Si je ne veux retenir que quelques éléments marquants pour moi, ce sont les projets qui ont contribué à changer le monde, sans vouloir être hautain. En particulier tout ce qui a permis de développer une technologie et d’aboutir sur le marché.
Je citerai l’accélérateur de particule LHEC pour le CERN qui a permis de montrer notre capacité à gérer de grands projets sur une période de 10 ans, et notre capacité à aller vers une logique d’équipementier. Il y aussi le projet de la TCFM avec la société SCLE qui a été le premier sujet traité depuis la conception jusqu’à la fabrication et je remercie la société SCLE de nous avoir fait confiance à ce moment là. Enfin, nos travaux sur le véhicule électrique depuis 1991 et la concrétisation industrielle sur le projet Autolib et Bluecar qui a permis de produire jusqu’à 9000 produits. C’est forcément restrictif car beaucoup d’autres projets nous ont marqué mais ce sont les éléments marquants de la vie de la société.

Cirtem est une société avec des valeurs fortes de plaisir au travail, d’innovation élégante, d’agilité et de respect des personnes. En tant que Dirigeant, comment avez-vous décliné ces valeurs dans la vie de l’entreprise ?

C’est difficile de répondre à la question. Je pourrai résumer en disant que c’est en gardant beaucoup de plaisir à diriger. Parce que il faut l’appliquer à soi-même, être agile et avoir le plaisir de diriger et je pense que c’est communicatif. Donc je me suis efforcé de rester sur ces fondamentaux, de transmettre cela le plus possible aux équipes, et de le prendre en compte dans les recrutements et le management des équipes.
En termes de ressources humaines nous avons essayé de rester fidèle aux valeurs humaines et fidèles aux personnes le plus possible, dans un cadre de proximité très fort.

Cet anniversaire est aussi pour Cirtem un changement dans la continuité, puisque vous confiez dorénavant la Direction de l’entreprise à Stéphane de La Fournière, et que le positionnement évolue vers celui d’équipementier industriel. Que souhaitez-vous à Cirtem pour l’avenir ?

D’abord, ce choix d’équipementier industriel est consécutif à l’évolution du monde actuel, qui nous a poussé à faire ce choix là il y a 3 ou 4 ans et CIRTEM a toutes les capacités pour le développer. Ensuite, la nomination de Stéphane à la direction de l’entreprise a été préparé de longue date, nous avons travaillé ensemble depuis 1996 et nous nous connaissons depuis 1991. même si nous sommes très différents, nous partageons les mêmes valeurs. Stéphane a toute les compétences pour développer l’entreprise et assurer la pérennité de l’entreprise, de ses emplois, et de ses valeurs.

Et vous, personnellement, quels sont vos projets ?

Je n’ai pas pris ma retraite, mais j’ai abandonné les activité directement opérationnelles. Je reste dans une logique de support et de conseil pour faire bénéficier les entreprises industrielles de proximité de mon expérience sur le management d’entreprise, la R&D et l’innovation. Je souhaite néanmoins réserver beaucoup plus de temps pour ma famille ainsi que pour des projets personnels de navigation sur les océans….

Merci !